Une overdose de pathos dans Wild de Jean-Marc Vallée

En juin 1995, Cheryl Strayed entame un périple de 1 700 kilomètres sur le Pacific Crest Trail, un sentier de randonnée à l’ouest des Etats-Unis reliant les frontières mexicaine et canadienne. Son but ? Se retrouver seule avec elle-même et affronter les démons de son passé : la disparition de sa mère tant aimée, le deuil impossible, la plongée dans diverses addictions et la destruction de son couple. Cela fait beaucoup à porter… Et comme le sac à dos monstrueux que Cheryl trimballe sur ses épaules, c’est parfois un peu lourd. Y compris pour le spectateur.

Certes, j’avoue, le sentiment d’identification a d’abord été là : cette Cheryl qui plaque tout et va repousser ses limites pour faire son deuil, c’est moi ! Bon, à quelques détails près racontés ici… Je suis flemmarde, ne l’oublions pas, et le bus Greyhound comme rédemption peut être tout aussi efficace que la marche. Bref, en débutant la randonnée avec Cheryl, je pensais vivre une expérience expiatoire similaire. Erreur, et déception.

Alors que je m’attendais – comme tout le monde – à découvrir un Into the Wild au féminin, le film de Jean-Marc Vallée (C.R.A.Z.Y., Dallas Buyers Club…) n’a rien à voir avec l’œuvre poétique et pudique de Sean Penn. Le voyage initiatique de son héroïne ne se tourne pas vers les paysages sauvages qui l’entourent, mais vers son passé douloureux. Le réalisateur nous inonde de flashbacks étouffants, filmés comme des clips sensoriels, où les malheurs de Cheryl s’enchaînent. A tel point qu’il est difficile de ne pas suffoquer. Seule la nature époustouflante que traverse la jeune femme pourrait nous redonner une bouffée d’air frais. Mais Jean-Marc Vallée semble avoir oublié de la filmer. Sa préférence va au corps meurtri de son personnage : genoux ensanglantés, croûtes dans le dos, ongles de pieds qui s’arrachent (attention, âmes sensibles, la scène d’ouverture peut faire tourner de l’œil !). La déchéance de l’humain en devient gênante, voyeuriste, inutile. Ok, il faut souffrir pour renaître de ses cendres. Mais est-il pour autant nécessaire de flirter avec le misérabilisme afin que le spectateur ressente de la compassion ?

Je reste persuadée que la blonde Reese Witherspoon (qui joue Cheryl Strayed) n’a pas besoin de ça pour prendre sa revanche sur le passé ! Et alors que, face à cette avalanche de maux, j’étais à une seringue de l’overdose, la fraîcheur et la justesse de son jeu m’ont (presque) sauvée. Il faut dire que, depuis qu’elle a chanté « Jackson » avec Joaquin Phoenix, mon petit cœur a définitivement vacillé, et que je ne suis plus du tout objective à son sujet. Alors allez, chers membres de l’Académie, donnez-lui son Oscar, elle le mérite amplement !

Cam' dans un film

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Wild de Jean-Marc Vallée WILD – Sortie le 14 janvier 2015

Genre : biopic, drame
Réalisateur : Jean-Marc Vallée
Scénariste : Nick Hornby, d’après le best-seller de Cheryl Strayed
Avec : Reese Witherspoon, Laura Dern, Thomas Sadoski, Gaby Hoffmann, Michiel Huisman, Keene McRae…
Bande-originale : Susan Jacobs

Pour en savoir plus :
Voir la bande-annonce de Wild
– La fiche technique complète du film sur Allociné
– Ecouter la bande originale de Wild sur Spotify

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