Il avait une gueule d’ange, et le diable au corps. Jim Morrison, visage emblématique d’un des plus grands groupes de rock de tous les temps, a révolutionné le monde de la musique en seulement 10 ans de carrière. Illustre icône du club des 27, il est sûrement le seul qui déclenche encore aujourd’hui autant de passion et d’hystérie (peut-être ex aequo avec Kurt Cobain, on vous l’accorde…). C’est à ce monstre sacré que s’attaque Oliver Stone dans le biopic The Doors. Car si le film porte bien le nom du groupe culte, c’est surtout à l’homme que s’intéresse le réalisateur de Platoon, JFK et Wall Street. Un homme qui semble le fasciner à tel point qu’il nous offre un véritable trip hallucinatoire, un corps à corps avec le mythe. Un mythe qui s’est brûlé les ailes alors qu’il était au sommet de sa gloire, après être allé faire un tour au-delà des frontières du réel. Parce que bien avant Mulder, Jim Morrison le savait déjà : la vérité est ailleurs…
Pour porter le mythe, il fallait une gueule, un acteur habité. C’est là qu’entre en scène Val Kilmer. Les puristes auront beau prétexter que Jim Morrison est irremplaçable et inimitable, ils ne pourront que s’incliner devant l’incarnation de Val Kilmer. Au fil des enregistrements, des concerts, des excès, la démarche se dessine, le corps se meut, l’esprit s’émeut, on oublie Val, Jim est là. Bluffant, voire perturbant. Il relègue même au second plan (à moins que ce soit un choix volontaire d’Oliver Stone) les autres comédiens/membres du groupe, tous excellents au demeurant (Kyle MacLachlan en Ray Manzarek, Frank Whaley en Robby Krieger et Kevin Dillon en John Densmore).
Le roi lézard est donc au cœur de tout. Et notamment, des scènes de concert absolument sidérantes qui nous font presque oublier que l’on est dans une fiction. Elles nous donnent l’impression d’être sur scène avec le groupe, avec les policiers faisant barrage entre Morrison et le public, dans la foule avec les fans hystériques. The Doors pourrait flirter avec la retransmission de live, si ce n’était les échappées psychédéliques et chamaniques explorées par Oliver Stone tout au long du film. Avec, pour seul exemple, la scène de sexe complètement barrée entre Jim Morrison et Patricia Kennealy (Kathleen Quinlan) sur fond de Carmina Burana.
Qu’on se le dise, The Doors n’est pas un film facile à regarder, il ne parle pas véritablement de la musique et du travail de création du groupe. Il préfère se concentrer sur un homme sans limite, près à aller voir ce qu’il y a derrière. Est-il pour autant égocentrique ? Sorti entre Né un 4 juillet et JFK, The Doors pourrait être le film d’Oliver Stone que l’on oublie de citer en soirée. Face à la guerre du Vietnam et à l’assassinat de Kennedy, thèmes chers au réalisateur et événements fondateurs des Etats-Unis d’aujourd’hui, le nombril de Jim Morrison aurait pu en effet passer à la trappe. Et pourtant, même s’il ne s’agit pas d’un des pamphlets politiques dont Oliver Stone a le secret, The Doors raconte bel et bien une génération. Précisément, cette génération en rébellion avec l’establishment, hantée par la mort de Kennedy et le Vietnam. Une génération en quête de nouvelles expériences et de liberté, dont Jim Morrison, parmi tant d’autres, restera l’un des symboles, jusqu’à « The End »…
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THE DOORS – Sortie le 30 avril 1991
Genre : biopic
Réalisateur : Oliver Stone
Scénaristes : Oliver Stone, Randall Jahnson
Avec : Val Kilmer, Meg Ryan, Kyle MacLachlan, Frank Whaley, Kevin Dillon, Kathleen Quinlan…
Pour en savoir plus :
– Voir la bande-annonce de The Doors
– La fiche technique complète du film sur IMDb
– Ecouter la musique du film (playlist) sur Spotify
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